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UNPI Val de Loire
Tours - Blois - Orléans
Chambre Syndicale de la Propriété Immobilière
Val-de-Loire

Pour en finir avec le squat

Pour en finir avec le squat

L’affaire de Théoule sur Mer a mis sur le devant de l’actualité la question des squatters et des réponses judiciaires ou législatives que l’on peut lui apporter.

Après tout ce que l’on a pu lire, entendre ou voir, il apparaît nécessaire de faire un point.

Le squat, c’est l’intrusion puis le maintien dans un bien, par une ou plusieurs personnes sans droit au détriment de celui ou celle ou ceux qui en ont le droit (propriétaire ou locataire).

La nature du bien « squatté » détermine la solution à apporter à cette situation de toute façon illégale, et qui est souvent vécue par la « victime » comme un viol de son intimité.

Premier cas : il s’agit d’un bien immobilier garni de biens meubles 

Les faits rentrent dans la définition de la violation de domicile, réprimée par l’article 226-4 du Code Pénal :

« L'introduction dans le domicile d'autrui à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende »

Deux conditions doivent être remplies pour l’application de ce texte :

  • Le domicile d’autrui :

La Cour de Cassation par un arrêt du 04 janvier 1977 a donné la définition du « domicile » figurant dans cet article c’est : « le bien où, que l’intéressé y habite ou non, a le droit de se dire chez lui, quelque soit le titre juridique de son occupation ».

Première remarque : cela concerne autant un locataire, qu’un propriétaire ou un occupant à titre gratuit.

Deuxième remarque : il n’y a pas de différence entre la résidence principale ou une résidence secondaire.

  • Les modalités d’intrusion :

Le cas le plus courant et fréquent est la voie de fait qui recouvre l’effraction.

Si ces deux conditions sont remplies, le squat constitue une infraction pénale : c’est un délit passible d’emprisonnement.

En 2015, à la suite de l’affaire Maryvonne, cette infraction a été qualifiée de « continue ».

Cela veut dire que l’infraction existe non seulement lors de l’entrée dans les lieux mais également pendant toute la durée de l’occupation du bien.

Les forces de l’ordre, Police comme Gendarmerie, ont donc l’obligation d’intervenir.

Cette intervention leur permet de vérifier que les conditions de la constitution de l’infraction soient remplies.

A partir de là, la présence d’un Officier de Police Judiciaire est nécessaire pour tirer les conséquences d’un « flagrant délit ».

La procédure est prévue par l’article 53 du code de Procédure Pénale qui permet de faire cesser l’infraction et « garde à vue » de l’auteur ou des auteurs de l’infraction.

Cela veut dire que le « domicile » est libéré et que son légitime propriétaire ou détenteur est en droit de le récupérer, et d’y entrer, de s’y installer et d’assurer sa sécurité par sa fermeture.

C’est ainsi que les squats de domicile doivent se régler.

A refuser d’agir ainsi les forces de l’ordre s’exposent à des réactions directes de la population et des victimes.

Rappelons sur ce point les dispositions de l’article 73 du Code de Procédure Pénale :

« Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l'auteur et le conduire devant l'officier de police judiciaire le plus proche. »

Il est donc indispensable pour éviter tout débordement, que le Ministère de l’Intérieur et le Ministère de la Justice réussissent pour une fois à s’entendre et adressent aux forces de l’ordre une instruction claire sur l’action à mener.

Deux observations pour clore ce chapitre :

  • Le délai de 48h dont on entend souvent parler concerne les résidences secondaires

Depuis 2015, ce délai n’existe plus. L’infraction continue l’a mis à néant.

  • La nécessité de saisir un juge civil (Tribunal Judiciaire) pour voir ordonner l’expulsion et ensuite obtenir du Préfet l’assistance de la force publique.

L’argument des défenseurs de cette thèse est que seul un juge peut déterminer les conditions dans lesquelles les squatteurs peuvent perdre ce toit qui les abrite.

Deux points mettent à néant cette théorie :

  • Le simple bon sens : prenez l’exemple du truand qui pille une bijouterie et qui se fait arrêter en flagrant délit en possession des bijoux. Va-t-on demander au bijoutier de lancer une procédure civile pour récupérer le butin du vol ?
  • Enfin si à l’issue de la garde à vue le « squatter » se réintroduisait dans l’immeuble, il serait immédiatement en infraction, la même procédure devrait s’appliquer

Naturellement, la victime a toujours la possibilité de choisir la voie civile et se trouve dans cette hypothèse dans la même situation que le deuxième cas.

Mais il existe une procédure spéciale instaurée par l’article 38 de la loi DALO qui permet à la victime de demander directement au Préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux dans les 24h et si elle n’est pas suivie d’effet de procéder à l’expulsion.

Mais il faut que la victime ait :

- déposé plainte

- fait la preuve que le logement est son domicile

- fait constater l’occupation illicite par un Officier de Police Judiciaire

Pourquoi utiliser cette procédure alors que l’action pénale est immédiate et obéit aux mêmes conditions ?

Et si on l’utilise quel sera le délai d’action du Préfet pour expulsion.

C’est la raison pour laquelle la Ministre soutient un amendement qui voudrait compléter ce texte : seraient visées les résidences principales, secondaires et occasionnelles. Le Préfet aurait 48h pour faire la mise en demeure et devrait ensuite expulser « sans délai ».

Bien sûr c’est une avancée, mais bien insuffisante et à mon sens inutile.

Deuxième cas :

Il s’agit des bureaux, entrepôts, logements vides et terrains. Pour eux la qualification pénale de violation de domicile ne s’applique pas et la procédure est la voie civile avec ses lenteurs, ses aléas.

Il faut faire constater le squat (par huissier), réussir à trouver l’identité des squatters, les assigner devant le juge et après décision poursuivre l’exécution, en notant que la loi ELAN a imposé que la trêve hivernale ne s’applique pas à ce type d’expulsion.

Mais c’est insuffisant, et le projet de loi AUBERT, tend à améliorer la situation des victimes étendant l’article 226-4 du code Pénal à l’occupation sans droit ni titre d’un bien immobilier appartenant à un tiers.

En conclusion, seule la fermeté et le courage des victimes de squatters est de nature à freiner le phénomène malheureusement soutenu par des officines pour qui les personnes privées de leur bien ne sont pas les victimes, ce terme étant réservé aux squatters, victimes de la société et dépourvus de toit.

Ainsi est foulée au pied la réalité et bafoué l’état de droit.

 

Dominique GROGNARD